Il s’agit de regards d’adultes sur des identités et des vies d’enfants, les enfants n’ayant pas laissé de traces écrites de leurs vies, à part de très rares exceptions, et encore est-ce l’enfant
à l’âge adulte qui a écrit sur ce qu’il se souvient avoir vécu et ressenti. Et encore, ces témoignages sont-ils masculins, les garçons ayant bien plus accès à l’école, au métier d’écrivain et
étant plus libres de leurs pensées et parole.
On aborde toutes les facettes de l’enfance : avant la naissance, les conditions de vie et de survie, l’éducation en famille, le travail, le regard des adultes, la médecine et la littérature, les
droits, les vêtements, l’espace dans la maison.
Après un chapitre éprouvant à lire sur le travail des enfants, on se réjouit de la première loi de 1841 le règlementant : âge minimal à l’embauche fixé à 8 ans, travail de nuit interdit aux
enfants de moins de 13 ans (à moins qu’ils travaillent dans des usines à moteur continu), les enfants doivent en même remps fréquenter l’école jusqu’à 12 ans, victoire ! En réalité, avec 8
inspecteurs pour la France entière, quasiment rien ne bouge. Les quelques enfants qui arrivent à concilier travail et école s’endorment soit à l’usine où ils prennent des coups, soit à l’école…
où ils prennent des coups.
Bon, c’est quand même une avancée, n’est-ce pas ? Mais ce qui est effrayant c’est d’apprendre par quel raisonnement l’État commence à se soucier de la santé physique de ses enfants : si on les
laisse mourir par manque de soins médicaux et par épuisement au travail, l’État, dans les générations futures diminuées, n’aura pas assez de bras pour travailler et enrichir la classe dirigeante,
ni assez de soldats pour mourir pour la patrie ! #wtf !
1833, la loi Guizot jette les bases d’une école obligatoire. Super ! En voilà un qui se soucie de l’éducation… Motivation de l’État pour voter cette loi : l’école est un instrument
d’intégration des classes populaires, que la révolte des canuts (ouvriers dans l’industrie textile) de Lyon en 1831, avait révélées potentiellement dangereuses. Rentrez dans le rang, écoliers,
vous serez formatez à l’obéissance !
Bien sûr, cette école n’est pas encore pour les filles. Les premières générations de filles à être massivement scolarisées sont nées dans les années 1890.
Ce qui est très intéressant, c’est de comprendre comment l’enfant est perçu, comment le regard de l’adulte change. Un inspecteur écrit à la fin du siècle : "En face des droits de l’homme, il y a
les droits de l’enfant. N’est-ce pas une anomalie d’admettre ceux-là sans ceci?"
Si, monsieur, je ne peux qu’être d’accord. En ce qui concerne les droits des femmes, des mères, des épouses, des mères célibataires, on en reparlera dans un siècle…